Kenobi 1&2 : la leçon Rian Johnson

Sorti hier sur Disney+, les deux premiers épisodes de Kenobi sont disponibles et il est temps d’en faire le tour. Et si dores et déjà vous voulez un avis, sachez que pour moi c’est un grand « oui » ! Mais détaillons un peu voulez-vous ?

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Kenobi : Épisode 1&2

Nostalogie

Pour bien comprendre Kenobi, il est hélas recommandé d’avoir vu et compris les épisodes VII, VIII et IX. Non pas que leurs histoires soient intrinsèques d’une quelconque manière, mais surtout les épisodes VII et VIII, respectivement réalisés par Abrams et Johnson, sont des modèles de ce qu’il convient de ne pas faire. Et si The Force Awakens était un film qui ne se posait jamais et jouait entièrement sur la seule carte du fan service au détriment de sa propre histoire et de personnages originaux, on pouvait encore se dire qu’il était une démonstration de force de Disney, comme si ces derniers vous disaient : Okay, vous voyez ? On maîtrise les codes de Star Wars. Les vrais codes. Ceux de la trilogie originale.

Parce que, qu’on se le dise bien, beaucoup de puristes (et on sait tous à quel point les fanatiques peuvent s’avérer bornés, Star Wars relevant presque de la religion pour certains) détestent la seconde trilogie, nommée consensuellement la prélogie. Mais c’est oublier le contexte temporel de ces deux trilogies, contexte aussi bien interne à la narration qu’externe dans notre propre monde.

En effet, si la trilogie originale regorgeait d’action et la prélogie beaucoup moins, cela tient au fait que dans la trilogie originale nous suivons des rebelles qui luttent contre un Empire, donc en pleine guerre civile et nous suivons des figures emblématiques de cette rébellion qui plus est. La prélogie, elle, raconte comment d’un blocus d’une planète nous parvenons à l’avènement de l’Empire de la trilogie originale et l’ascension de Vador.

Il est de facto logique que les films soient plus posés et se concentrent sur la politique, à l’exception de la Revenge of the Sith, alors en pleine guerre déclarée entre la CSI et la République. Et c’est bien ce côté posé, associé au mythe de Vador désormais cassé pour certain car expliqué précisément, qui a déplut. Mais ça n’enlève rien au fait que ce sont de bonnes oeuvres bien écrites, bien jouées et bien orchestrées. Faites avec, c’est tout. Vous avez le droit de ne pas aimer, mais un brin d’objectivité.

Mais depuis, The Last Jedi est passé par là, et ce film est un massacre à tous les niveaux, ne respecte pas l’opus précédent (parce que que cet opus soit bon ou non n’empêche pas que deux oeuvres d’une trilogie, et à plus large échelle d’une saga se doivent d’être cohérentes) et Johnson est totalement en roue libre. Vous voulez une preuve ? Abrams avait signé le Faucon Millenium en marquant J.J. sur sa carlingue. Et bien Johnson a barré un J et rajouté sa propre initiale, R, faisant désormais R.J. Ça vous donne déjà un indice de la puérilité de l’homme mais déjà je digresse.

The Last Jedi donc, est un film très posé, et c’est partiellement à ça qu’est due la haine qu’il reçoit, mais aussi et surtout parce qu’il écrit sans aucune forme de cohérence et que même sa réalisation est bâclée sans parler de sa direction artistique. Si The Force Awakens était un TGV et The Last Jedi une voiture sans permis, si The Force Awakens donnaient aux fans du « vrai » Star Wars et que The Last Jedi prenait le contrepied de tout ce qu’espérait le spectateur, et bien Kenobi tiendrait plus de The Last Jedi.

Effrayant non ? Sauf qu’ici, et bien ça marche, principalement parce que c’est pas fait par un incompétent et qu’on a aux commandes quelqu’un avec une vision claire et les coudées franches.

Prendre son temps

Alors déjà, la scène d’ouverture. Parlons en. Elle se déroule pendant la mise à sac du Temple Jedi pendant l’Ordre 66, et il s’agit d’un plan séquence absolument magnifique, millimétré et bien chorégraphié. On peut entre autre noter les nouveaux sabres lasers, déjà aperçus dans la nostalogie, qui permettent désormais de réduire les effets spéciaux par rotoscopie appliqué sur ceux de la trilogie originale et de la prélogie. Cela permet un rendu bien plus naturel dans l’éclairage et les reflets de la lumière de l’arme en plus de facilité les chorégraphie.

Ce plan séquence donc, est destiné à nous introduire le personnage de Reva, alors enfant d’une dizaine d’année qui, voyant son maître Jedi perdre la vie, entraîne ses camarades dans une fuite du Temple. Malheureusement, elle sera capturée, torturée et transformée en Inquisitrice adepte du côté Obscur spécialisée dans la traque des Jedi. Son propre passé de Jedi lui est d’ailleurs constamment renvoyé par le Grand Inquisiteur lui-même et le Cinquième Frère, comme si elle n’était pas pure (l’idée de pureté, liée à la force ou à la race est d’ailleurs une thématique souvent travaillée pour les personnages liés au côté Obscur dans les oeuvres). Reva, la Troisième Soeur est donc un personnage particulièrement impulsif et colérique (mais pas capricieux, nuance) qui est une adepte des méthodes fortes et brutales pour parvenir à ses fins.

Et déjà je dois souligner un très bon point pour Kenobi. Outre la performance tout à fait honorable de Ingram dans son rôle, c’est la première fois que nous avons une antagoniste dans du Star Wars live action, et surtout une antagoniste noire. Beaucoup de gens pointent la culture woke chez Disney, très en vogue aux Etats-Unis et en cours d’importation chez nous, mais force est d’admettre que pour le coup, une femme noire, antagoniste, c’est du jamais vu dans Star Wars. Et non seulement j’ai découvert une bonne actrice mais le casting est parfait, à fortiori car elle se dessine dans ces deux épisodes comme l’antagoniste principal de Kenobi.

Désarmer vos attentes

Mais venons-en à lui d’ailleurs, car la série porte son nom après tout. Le premier épisode donc, passé la séquence introductive de l’Inquisitorius, vous déstabilisera. Le but est de nous montrer comment dix ans plus tard il vit en ermite dans le désert de Tatooine. Et c’est bien fait. La réalisatrice s’appesanti volontairement dans le récit pour bien montrer la monotonie de son quotidien. Travaillant comme découpeur de viande (de dragon Krait, comme celui aperçu dans The Mandalorian à priori), rentrant à Anchorhead, nourissant sa monture et rentrant chez lui, tractant avec le peuple Jawa, surveillant Luke… Oui, le quotidien de cet ancien maître du Conseil Jedi est bien morne et terne. Et tout est fait pour nous le faire sentir.

Et c’est là que l’idée de génie pointe le bout de son nez. Comment éloigner Kenobi de Tatooine et de la mission qu’il s’est fixé, à savoir protéger Luke, ce qui occasionne des soucis quant à son code moral et la nécessité de faire profil bas devant les injustices pour poursuivre cette mission et un jour, former le fils de son ami ?

La réponse ? Leïa. Leïa Organa. Parce que l’événement déclencheur c’est qu’une fois introduit un peu la petite Leïa, ce sera son enlèvement par des chasseurs de primes. Et c’est bien ça qui va pousser Bail Organa, désireux de ne pas attirer l’attention des autorités sur sa fille adoptive afin qu’on ne découvre pas ses origines et son ascendance, à revenir vers Kenobi afin de la solliciter pour aller sauver sa fille.

Forcé de reprendre les armes et la traque, Kenobi quitte donc Tatooine dans le second épisode pour se mettre en quête de Leïa. Si il y a de l’action, n’espérait pas de grands éclats. Tout le monde espère effectivement voir Ewan McGregor brandir son sabre laser, prendre la position de garde du Soresu (son style de combat au sabre laser) et affronter l’Inquisitorius.

Mais voilà. Ça n’arrivera pas. Obi-Wan n’a pas pratiqué depuis dix ans, il a vieilli, il n’est plus en forme et si cela pourrait d’abord sembler proche du Luke Skywalker de The Last Jedi, en vérité j’y ai davantage vu du Logan. On y voit un homme âgé désormais, encore capable de beaucoup de choses mais clairement plus au sommet de sa puissance. Si dans la Revenge of the Sith, Obi-Wan est sans conteste le Jedi le plus puissant de son temps, aujourd’hui il n’est plus que l’ombre de lui-même.

Perdu, traqué, n’ayant plus usé de la Force ou de son sabre (qu’il avait enterré dans le désert à côté de celui d’Anakin) depuis une décennie, le personnage est superbement mis en valeur par la performance (sans surprise) de Ewan McGregor. C’est en cela qu’il surprend le spectateur qui attendait/espérait voir Kenobi être le Jedi qu’il était, mais en est finalement très loin.

Et contrairement à The Last Jedi qui a écrit Luke Skywalker comme un vieux bougon indécis et reclus, le développement de Kenobi est parfaitement logique et coordonné. Donc, Rian Johnson, prends-en de la graine !

Ainsi, convaincu d’aller sauver la fille de son ami et frère d’arme, Kenobi repart écumer la galaxie et arrive sur une planète du nom de Daiyu. Exit Tatooine et son désert dont nous avons déjà bien trop bouffé jusqu’à maintenant. Daiyu est une planète pauvre et malfamée particulièrement urbanisée et c’est dans ce dédale que Kenobi devra retrouver Leïa. Trafiquants, kidnappeurs et bandits de tout poils vivent ici.

Mais si il parviendra rapidement à retrouver Leïa, celle-ci aura du mal à lui faire confiance, très insouciante quant à son jeune âge en dépit de son intellect déjà très développé. Petit clin d’oeil au passage quand Kenobi lui trouve un vêtement pour la dissimuler : il lui prendra une cape verte qui n’est pas sans rappeler le poncho que portait Carrie Fisher dans Return of the Jedi.

Cependant, la capture de Leïa était un plan de Reva, la Troisième Soeur. En effet, celle-ci nourrit une obsession pour la capture de Kenobi, obsession nourrie par une ambition que le Cinquième Frère et le Grand Inquisiteur ne manquent pas de lui reprocher.

Kenobi se retrouve donc pris au piège à protéger une enfant kidnappée parce que l’Inquisitorius le cherche lui avant tout, devant gagner la confiance de cette enfant tout en devant faire avec le poids des années et le manque de pratique.

C’est d’ailleurs vers une évolution dans le regain de certaines capacités que le personnage se dirige. Il n’allume même pas son sabre laser dans ces deux épisodes et il peine à utiliser la Force. Mais ce qui se dessine c’est surtout la relation Kenobi-Leïa, qui, n’en doutons pas, deviendra forte avec le temps, ce qui poussera la jeune sénatrice qu’elle sera au début de A New Hope à faire appel à lui, tout comme son père, Bail Organa l’avait fait alors qu’elle n’avait qu’une dizaine d’année.

Pour conclure, les effets spéciaux et les CGI sont à la hauteur sinon plus de ce qu’on a pu voir dans la nostalogie, avec enfin un véritable environnement qui « sente » le Star Wars. Et ça fait du bien. The Mandalorian était une série en dent de scie qualitativement parlant, avec une structure très répétitive mais demeurait un vent de fraîcheur par rapport aux trois derniers opus cinématographique. The Book of Boba Fett est une sombre erreur (sauf quand les épisodes portent sur le Mandalorien), mais Kenobi est véritablement le vent de fraîcheur qui fait du bien, en particulier grâce à son inspiration Old Man Logan qui transpire dans un univers Star Wars teinté d’une ambiance Cyberpunk des plus délicieuses.

Remerciements

Je tiens à remercier particulièrement le critique cinéma connu sur YouTube sous le pseudonyme de Durendal, qui avec ces très longues vidéos sur Star Wars que je conseille pour leur qualité et leur profondeur (on parle de pas loin de 2h30 rien que pour The Last Jedi) m’a permit de bien comprendre Kenobi (en espérant qu’il soit du même avis que moi bien sûr ^^). Je ne peux que vous encourager à aller voir sa chaîne et à vous abonner. Le bonhomme est non seulement super productif mais également, je le répète, très qualitatif. C’est quelqu’un d’extrêmement doué pour la vulgarisation de la technique et la symbolique et c’est à lui que je dois la majeure partie de mes connaissances concernant le cinéma. Donc Dudu, si tu lis ça, merci !

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7 réflexions sur “Kenobi 1&2 : la leçon Rian Johnson”

  1. Je n’ai à faire aucun effort. Surtout pas envers quelqu’un qui ne vient pas en quête d’une discussion mais simplement d’un pur déversement de rage et de négation. Cet avis, que je prétends aussi objectif que possible, n’en demeure pas moins ce qu’il est : un avis. Mais la prélogie sont objectivement des oeuvres bien écrites et avec du sens. Et ça ce n’est pas un avis, c’est un fait : Star Wars a opéré deux révolutions avec d’abord la trilogie originale, puis la seconde, fut-ce d’un point de vue technique.

    Donc avant de me demander de faire un effort, s’agirait-il de s’assurer d’en faire soi-même et de comprendre ce dont il est question.

  2. Vous êtes très contradictoire parce que l’objectivité, vous l’avez demandé en premier en parlant de la prélogie. Je vous cite : « Vous avez le droit de ne pas aimer, mais un brin d’objectivité. »

    Faites un effort merci.

  3. Parce que tu espères une réponse constructive après être venu déverser ta rage ? Tu te sens mieux ? Tu demandes de l’objectivité pour une critique d’un art (qui par conséquent est subjectif) ? Et c’est moi qui n’ai rien compris ?

    J’ai pas besoin d’en dire plus.

  4. Docteur Benway

    Non. Vraiment. L’argument du « si l’épisode est chiant, c’est bien pour vous faire sentir à quel point le quotidien de Obi est monotone », c’est un argument qui n’a jamais été valable, qu’elle que soit l’œuvre à laquelle il s’applique.
    Le premier épisode de la série est naze. Point. Tu peux l’aimer si tu veux, il faut quand même être objectif. C’est un épisode dans la droite lignée de ce que l’on appelle aujourd’hui les « épisodes d’introduction » : 1h de vide intersidéral pour nous expliquer un truc qui devrait prendre 10 minutes. Le mal de la décennie, joyeusement inventé par les plate-forme type Netflix qui écrivent désormais les séries en 1 bloc et non plus épisode par épisode : la narration s’en ressent, le rythme aussi (et c’est aussi pour ça qu’aujourd’hui on se tape des blockbo de 3h plein de vide… oui Marvel/Disney, on parle toujours de vous).

    Avait-on besoin qu’on nous explique ce que Obi Wan avait branlé pendant 10 and après l’épisode III? Non!! Là, on a donc un épisode mou du genou, inoffensif, à l’écriture pataude, avec des personnages simplistes (l’inquisitrice, c’est un désastre, autant dans l’écriture du personnage que du jeu de l’actrice), des scènes d’action mal branlées, des maquillages tout cheap…

    Disney fait ce qu’il fait depuis le début : rejouer la carte de la nostalgie. Maintenant qu’ils ont ciblés les fans de la trilo, ils passent à ceux de la prélo. Mais tout ça n’invente rien de nouveau et se contente de ressasser le passé sans jamais prendre de risques.

    (Et puis citer Durandal dans ton article, ça te discrédite tout de suite : le mec est une vaste blague. C’est quand même un mec qui trouve que Lucy de Luc Besson est un film hautement philosophique)

  5. Y a pas de mal.
    Ça arrive à tout le monde et statistiquement ça augmente avec la densité et l’urgence en effet.
    Beau boulot tout de même ça n’enlève rien au résultat.

  6. Effectivement, my bad. Mais l’article était dense à écrire et j’ai dû le bouclé vite pour coller à la sortie de la série. Je corrige ça de ce pas !

  7. Bel article, et je confirme Durendal c’est du lourd.
    Je vous encourage à lire d’ailleurs quelques romans fleuves noirs de l’UE Star Wars car même si certains sont déconnonisés, ça vaut toujours son pesant de crédits.

    Quelques petites coquilles :

    « On peut entre autre noté les nouveaux sabres lasers »

    « et un jour, formé le fils de son ami ? »

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