Tactics Ogre : Reborn : Ode à la nostalgie, hommage au temps [TEST]

J’ai eu la chance de pouvoir tester Tactics Ogre : Reborn avant sa sortie et de me plonger dans cet univers encore inconnu pour moi. Grande fan de la saga Final Fantasy, c’était une évidence pour moi de découvrir le jeu qui a inspiré l’épisode orienté tactical de ma série de jeux vidéo préférée : Final Fantasy Tactics. Disponible sur PS5, PS4, Nintendo Switch et PC, cette épopée devient accessible à bon nombre d’entre nous.

N’ayant pas eu l’occasion de jouer aux versions de 1995 et 2010, je pars à l’aventure avec un œil neuf, une vision dépourvue d’attentes particulières. Je vous emmène avec moi pour ce voyage en terres inconnues. Direction Valéria à travers ce test de Tactics Ogre : Reborn, que j’ai décidé d’aborder de façon moins conventionnelle et pragmatique, avec un brin de philosophie.

La première version de Tactics Ogre sort initialement en 1995 au Japon sur Super Nintendo, puis est plus tard portée sur PlayStation, Saturn et la console virtuelle de la Wii. Développé à l’origine par Quest Corporation, il fait partie intégrante de la saga “Ogre”. Second opus de cette saga, il suit le cheminement de l’œuvre de Yasumi Matsuno, le papa d’univers fantastiques comme Ivalice (Final Fantasy XII, Final Fantasy Tactics) ou LéaMundis (Vagrant Story).

Du lourd, quand on sait que Vagrant Story est l’un des rares titres à avoir obtenu la note maximale dans le magazine japonais Famitsu, à savoir 40 sur 40. Tactics Ogre n’a pas à en rougir car il obtient en 2006 la très belle 7e place du jeu vidéo préféré des lecteurs de ce même magazine.

C’est en 2010 que Square Enix fait renaître le jeu pour la seconde fois à travers une sortie sur leur Playstation Portable (PSP), rendant au passage ce titre accessible à l’international.

“Jamais deux sans trois”. Alors pourquoi pas une re-renaissance en 2022 pour faire découvrir ce bijou à d’autres générations ?

Les nouveautés de cette version Reborn

Au-delà des améliorations graphiques et sonores et la refonte du game design, Tactics Ogre : Reborn apporte son lot de nouveautés : 

  • un remaniement de l’IA rendant les batailles plus palpitantes et stratégiques
  • l’abandon des niveaux par classes de Tactics Ogre (2010) en faveur d’un système de niveaux indépendants pour les unités qui induit plus de libertés pour le joueur
  • l’ajout de diverses fonctionnalités QoL : mode rapide en combat, sauvegarde automatique, interface plus lisible et pratique…
  • une résolution améliorée pour les personnages et les décors, tout en préservant le charme du pixel art.
  • des doublages en japonais et en anglais
  • le réenregistrement de toutes les musiques avec de véritables instruments
  • de nouveaux contenus end-game comme le “Palais des Morts”, un donjon de 100 étages me rappelant indéniablement le mode de jeu du même nom introduit dans le MMORPG Final Fantasy XIV.

Ces nouveautés ne me parlent pas forcément étant donné que c’est la première fois que je joue à ce jeu emblématique. Ce qui est appréciable dans tous ces ajouts, c’est qu’ils ne viennent pas vider le jeu de son essence. Ils le complètent juste pour le rendre plus accessible, plus pratique, se rapprochant de l’ère du temps en lui apportant des fonctionnalités utiles sans le dénaturer.

L’histoire de Tactics Ogre : jeux de pouvoirs, jeux de guerres

“L’archipel de la Valeria, joyau de la mer d’Obero. Ses peuples se sont longtemps disputé le contrôle de ces terres ayant prospéré grâce au commerce maritime.

Jusqu’au jour où un homme a mis fin au conflit. Il s’agit de Dorgalua Oberyth, le « Roi conquérant ». Dorgalua a œuvré à la réconciliation entre les clans de l’archipel, et un demi-siècle durant, la Valeria a connu la prospérité.

Toutefois, à la mort du roi, la lutte pour sa succession a fait rage entre les Bakrams qui formaient la noblesse, les Galgastans composant la majorité de la population et le clan minoritaire des Walisters, plongeant à nouveau la Valeria dans la guerre.

Le conflit s’est par la suite éteint lorsque les camps bakrams et galgastans ont chacun fait mainmise sur une moitié de l’archipel, mais nul n’ignorait que ce calme n’était que temporaire.”

Source : Square Enix

En tant que RPG Tactical, il est assez logique de s’attendre à une histoire pleine de combats stratégiques et d’événements qui font directement suite à nos décisions. Nous vivons cette histoire à travers les yeux et les actes d’un jeune homme nommé Denam. Aux côtés de sa sœur Catiua et son ami Vyce, ce groupe de jeunes a pour ambition de venger leur patrie dévastée et la perte tragique de leur père. Une lutte pour la liberté s’engage alors, un chemin semé d’embûches mais aussi de rencontres décisives les attendent.

Nos choix auront donc de lourdes conséquences : chaque chemin emprunté ouvre une porte et peut en fermer une autre, ce qui nous pousse à faire nos choix en notre âme et conscience. Venir en aide à un personnage, accepter qu’il rejoigne ou non notre troupe, s’allier ou non à une faction… tout cela a des conséquences.

On nous pose d’ailleurs des questions très profondes dès le début de notre partie, accompagnées d’artworks absolument splendides en lien avec le destin et les tarots.

Cette particularité offre un potentiel de rejouabilité à Tactics Ogre : Reborn, l’occasion de voir les choses différemment à travers une nouvelle partie. On ne refait pas le monde avec des “si”, eh bien là si, justement, on en a la possibilité. Constater les conséquences de nos actes et à quel point un petit choix peut avoir une importance décisive. Ça fait réfléchir.

Épopée sur fond de guerre et de politique, je me dois d’avouer que ce n’est pas le sujet ni l’univers qui m’attirent le plus. C’est d’ailleurs pour cette raison que je n’ai pas accroché à la trame scénaristique de Final Fantasy XII développé par le même créateur. Je joue aux jeux vidéo pour rêver, pour fuir la réalité parfois. Je rêve d’univers colorés et saturés à des années lumière de l’ambiance véhiculée par Tactics Ogre. 

Pour autant, ça ne m’a pas dérangée et ce qui m’a le plus marquée, c’est plutôt l’évolution des personnages, les rôles qu’ils ont à jouer, les chemins que l’on doit prendre. Des années après mon expérience Final Fantasy XII, je peux enfin aborder ce type de contenu avec une vision plus mature.  

La narration et les textes sont d’une précision fine et accompagnent merveilleusement ce sujet à la fois sensible et implacable qu’est la guerre.

Les doublages nous immergent un peu plus dans cette aventure. Sans grande surprise, j’affectionne particulièrement la version japonaise et ses Voice Actors qui ont ce pouvoir fascinant d’incarner les émotions et tourments de nos protagonistes avec une facilité déconcertante.

Principes, interface et batailles : entre chaos et paix

En bon Tactical de ce nom, j’ai retrouvé le plaisir de jouer en tour par tour. Pas de stress, pas de pression, je peux prendre le temps de réaliser l’action que je juge la plus optimale, tester, revenir en arrière, observer d’un autre angle. 

Les déplacements sont assez instinctifs, les compétences faciles à trouver, comprendre et utiliser. J’ai apprécié la précision de l’interface quant à la trajectoire des projectiles qui peuvent, dans certaines configurations de map, retourner la situation. Les différentes perspectives disponibles sont très utiles pour planifier une stratégie et prendre de la hauteur par rapport au champ de bataille.

Le système de frise de personnages en bas de l’écran est intéressant et permet d’anticiper le prochain tour de l’ennemi et organiser notre stratégie : qui attaquer en premier, de qui s’éloigner…

J’ai apprécié la présence des petites cartes de tarots qui procurent des buffs ou bien des malus pour pimenter nos batailles. Nos ennemis pouvant aussi les ramasser ou les emplacements étant parfois risqués à atteindre, elles apportent une réflexion supplémentaire sur la façon de mener notre combat. La symbolique du tarot et du destin me parle et j’apprécie qu’elle soit implémentée à plusieurs endroits du jeu.

N’ayant pas joué à un Tactical depuis le très bon Triangle Strategy, j’ai eu du mal à m’accommoder aux menus du jeu. Je les ai trouvés complexes et pas très ergonomiques au premier abord, très fournis et presque effrayants tant il y a d’options et de paramètres à prendre en compte pour optimiser son personnage.

Autant de caractéristiques, paramètres et options que de points sur la seconde image… De quoi faire tourner des têtes.

C’est après avoir compris que je devais l’aborder différemment des jeux d’aujourd’hui que j’ai pu me libérer de ce sentiment d’oppression et faire ce qui me semblait bien, à mon rythme, selon l’image et le rôle que je voulais donner à mes personnages.

Tout est personnalisable, du nom de votre personnage jusqu’au choix très pointu de sa classe, son allégeance, son élément, ses armes, compétences et passifs. Il vous est possible de lui donner une identité propre et de le construire à votre image.

Le niveau de difficulté est bien jaugé puisque le cap de niveau des personnages augmente en fonction du niveau de notre troupe, ce dernier étant lui-même dépendant de notre avancée dans l’histoire. Notre progression est donc homogène, logique et fluide et ne demande pas des heures de farm intensif pour se mettre à niveau.

Les combats restent cependant assez challenging et doivent être abordés avec une réflexion pointue. Heureusement, le système de Chariot permet de revenir quelques tours en arrière en cas de mauvaise décision stratégique.

Une patte graphique avec un charme minimaliste

Est-ce légitime de s’attarder sur les graphismes pour définir la qualité d’un jeu ? Avec sa patte graphique ancienne, Tactics Ogre : Reborn pourrait faire fuir plus d’un joueur de la jeune génération. 

Pour ma part, ce jeu éveille en moi des souvenirs de l’époque où j’ai découvert mes premiers jeux vidéo, où les personnages étaient clairement des bouillies de pixel et les fonds des plans fixes. Mais je trouvais ça tellement magique. Cette imperfection, ces visages pixelisés laissent place à l’imaginaire, à la possibilité de pouvoir penser les traits de nos personnages comme s’ils devaient prendre forme dans la vraie vie.

Même si j’apprécie énormément l’upgrade graphique et l’avancement technologique qui nous permettent d’admirer nos aventures préférées avec un sentiment de réalisme à couper le souffle, cette place laissée à l’imagination me manque. Et je la retrouve aujourd’hui, en 2022, à travers ce jeu au charme minimaliste. L’art est pur, sobre et brut et mis en valeur par un pixel art très mignon et attachant. Ceux qui me connaissent bien savent à quel point j’apprécie l’assemblage de ces petits carrés. Ces carrés qui, de près, ne ressemblent pas à grand chose, mais qui se révèlent une fois tous réunis pour former une entité, une histoire, un symbole qui a du sens.

En toute honnêteté, je dois avouer que je trouve un seul défaut à ce pixel art : son manque de lisibilité. Les personnages humains, alliés comme ennemis, se ressemblent trop et j’ai souvent eu du mal à distinguer du premier coup d’œil qui étaient mes compagnons. La problématique était d’autant plus gênante pour moi étant donné que j’ai joué au jeu sur ma télé, à distance et bien calée au fond de mon lit. Autant vous dire que j’ai plissé les yeux un bon nombre de fois à me dire “Attends, je suis où la ?!”. Cela reste une problématique minime une fois que l’on s’est habitué à utiliser la frise de personnages, à mémoriser les noms de nos alliés ou à comprendre le système de couleurs sur les unités. 

En plus de cet aspect pixel art qui me fait chaud au coeur, j’ai également apprécié les nombreux artworks que l’on peut découvrir au fur et à mesure du jeu, avec une préférence toute trouvée pour les personnages et la représentation des déesses en début de partie.

Bande son : éveil des sens et panache d’émotions

Adieu les musiques en MIDI de l’époque et place à une réorchestration de maître, sublime, qui donne des frissons et transpire tout un tas d’émotions. La tension, la colère, la rage, la violence se mêlent à des mélodies plus douces, poétiques, rêveuses, porteuses d’espoir… avec cette intensité et cette justesse dans la composition qui nous fait voyager et vivre chaque événement comme si nous y étions.

Ces jeux de cordes me font vibrer et m’ont laissée sans armes, sans défense face à ces vagues de sentiments procurées par la musique. Une des raisons pour lesquelles j’ai pris du temps à écrire ce test d’ailleurs, puisque je me suis laissée porter par ces mélodies tout au long de ma rédaction.

Pour un petit aperçu de cette masterpiece et faire du bien à vos oreilles, rendez-vous sur le Store japonais de Square Enix, sur lequel vous pourrez écouter quelques extraits.

Apprendre à prendre le temps

Je suis toujours très attentive aux ressentis et sensations qu’un jeu vidéo me procure. Parfois je ne m’en rends pas compte tout de suite, il faut laisser décanter les choses. C’est ce qui s’est passé avec Tactics Ogre : Reborn, et qui me pousse à sortir un test un peu tardif.

S’il y a une leçon que j’ai apprise récemment, et qui a été appuyée par ce jeu et son gameplay, c’est qu’il faut apprendre à prendre le temps. Tactics Ogre : Reborn est à l’opposé de bon nombre de jeux récents qui demandent de la vitesse, de la réactivité, de l’attention permanente. Qui, tout en nous exaltant, peuvent parfois nous vider de toute énergie tant ils nous demandent de concentration et d’exercice des sens. Ici, pas besoin de se dépêcher, d’autant plus que chacune de nos actions comptent et ont une incidence sur la suite des événements qui nous attendent.

C’est un retour aux sources qui fait du bien. Un jeu qu’on a envie de découvrir lentement, d’effeuiller comme une pâquerette jusqu’au “passionnément, à la folie”. C’est un jeu qu’on veut partager, qu’on veut jouer au coin du feu enroulé dans un plaid douillet avec son/sa partenaire ou son ami(e) comme allié pour cette épopée. 

Je comprends pourquoi ce jeu a été tant apprécié à travers les générations et pourquoi il l’est encore aujourd’hui. Il est d’une pertinence rare tout en apportant cette profondeur d’âme qu’on attend d’une histoire, cette histoire qui nous transporte hors du temps l’espace d’un instant. Je suis encore loin de l’avoir fini entièrement et j’ai hâte de le savourer lentement à sa juste mesure et d’en découvrir chaque facette, aussi pure, brute et intense soit elle.

En conclusion : ce qu'il faut retenir de Tactics Ogre : Reborn

1 réflexion sur “Tactics Ogre : Reborn : Ode à la nostalgie, hommage au temps [TEST]”

Les commentaires sont fermés.

Retour en haut