Sorti le 30 Janvier dernier, le premier épisode du jeu Life is Strange intitulé Chrysalis est un jeu d’aventure qui sera suivit de 4 autres épisodes. Créé par le studio français Dontnod, ce premier jeu épisodique français se démarque sur de nombreux points. Il nous plonge dans l’adolescence à travers les yeux d’une jeune fille de 18 ans rêvant de devenir photographe, soudainement embarquée dans le surnaturel. Cependant, afin d’appréhender le titre dans son entièreté, le contexte de sa création doit être pris en compte.
Le studio français à l’origine du jeu, Dontnod, a connu un succès mitigé avec leur tout premier jeu Remember Me, un jeu d’action-aventure sorti le 3 Juin 2013 et édité par Capcom. La survie du studio en devient compromise, des employés démissionnent, la période est compliquée.
Mais Dontnod devient le studio le plus subventionné de France grâce aux Fonds d’Aide au Jeu Vidéo du CNC (Centre National de la Cinématographie) et reçoit plusieurs centaines de milliers d’euros pour la création de leur nouveau projet intitulé « What If ? ». Cependant, ils subissent en Janvier 2014 un redressement judiciaire. Encore un coup dur, le moral ne vole pas bien haut.
Ils se sont donc investis corps et âmes dans ce nouveau projet, renommé Life is Strange, qui les sort complètement de l’univers futuriste urbain de Remember Me, pour les plonger dans les petites villes côtières américaines entourées de sapins à l’ambiance calme et ensoleillée.
«On a mis dedans tout ce qu’on voulait vraiment faire.On n’avait de compte à rendre à personne. On voulait toucher les gens, faire quelque chose d’un peu nostalgique sur cette période pivot de l’entrée dans l’âge adulte.» – Raoul Barbet, co-réalisateur du jeu.
D’où le nom de ce premier épisode Chryslis, chrysalide en français, qui représente un stade transitoire de développement, normalement chez les insectes. Ici, il s’agira du passage délicat de l’enfance à l’âge adulte : l’adolescence.
C’est à la Gamescom de mi-août 2014 que le studio annonce officiellement leur projet dans lequel ils croient tous : Life is Strange, leur premier jeu épisodique, édité par Square Enix qui aime l’ambiance décalée du jeu.
Un Telltale Games like ?
Life is Strange est un jeu d’aventure à la troisième personne qui reprend les mêmes principes que les jeux Telltale Games – dont le succès a conforté les créateurs de Dontnod pour la sortie de leur titre – avec un peu d’exploration, des choix de dialogues chronométrés aux conséquences importantes, des Q.T.E dont dépend votre survie et des graphismes cartoons simples mais efficaces. Cependant, le studio a voulu prendre ses caractéristiques à revers en imposant un rythme lent qui flirte avec la contemplation.
Ici, aucun chronomètre, aucun sacrifice à faire. Vous avez tout votre temps et même plus, et votre vie n’est pas dans la balance. Mais les décisions importantes à prendre sont bien là et trouveront leurs conséquences dans les épisodes suivants, puisque nous ne les constatons pas dans Chrysalis, malheureusement.
Tout comme les jeux TellTale Games, nous retrouvons une esthétique aquarelle cependant beaucoup mieux définie que celle de Game of Thrones par exemple, puisqu’il n’y a aucune bavure. Nous pouvons toutefois regretter le manque de détails dans les graphismes et la synchronisation labiale parfois décalée des personnages. Mais le titre étant sorti sur toutes les plateformes (PS4, PS3, PC, Xbox One et Xbox 360), cela peut expliquer les graphismes pauvres, heureusement rattrapés par les jeux d’acteurs qui ont parfaitement su retranscrire la lassitude et les tons moqueurs des ados, ainsi que les jeux de lumières extrêmement travaillés pour une ambiance chaude cocoonesque.
Je re-fais quoi maintenant ?
Vous incarnez une jeune fille simple prénommée Maxine, de 18 ans dont le rêve est de devenir photographe. Pour cela, elle revient dans sa petite ville natale qu’elle avait quitté pour Seattle : la ville portuaire d’Arcadia Bay, dans l’Oregon, USA, et intègre l’académie Blackwell proposant l’une des meilleures formations en photographie.
Dès les premières secondes du jeu, vous avez l’impression d’être dans Alan Wake, perdu dans un univers très sombre et chaotique au milieu d’une forêt, une tornade vous fonçant dessus. Vous savez que vous devez courir pour aller quelque part, mais où ? Alors vous courrez sans rien comprendre. Puis soudainement, vous vous réveillez en classe, essoufflée, avec en fond la voix de votre prof qui discute de grands photographes, la peste populaire essayant de lui lécher les bottes et les rayons du soleil rassurants traversant les fenêtres. Voilà le début mouvementé qui précède le retour au calme typique du jeu. Pas pour longtemps cependant, puisque après avoir photographié un papillon bleu, vous évitez une dispute mortelle à une mystérieuse fille aux cheveux bleus, en remontant le temps ! Ce nouveau pouvoir que vous venez de découvrir va vous changer la vie et marque là le pitch du jeu.
Comment gérer ce nouveau pouvoir tout en maintenant une vie sociale à peu près normale alors que vous êtes la nouvelle arrivée ? Que vous n’avez pas trouvé le courage de recontacter votre meilleure amie perdue de vue depuis 5 ans ? Que les murs de l’académie sont bardés d’affiches exposant la disparition d’une dénommée Rachel que tout le monde semblent aimer et regretter ?
Mais grâce à votre nouveau pouvoir, vous pourrez rembobiner n’importe quelles conversations et actions à l’infini, explorer toutes les options de dialogue, éviter des grosses disputes ou des violentes bagarres. Sachant que vous gardez les souvenirs et les objets même après avoir remonté le temps, ce qui vous offre de nouvelles options de dialogues ou d’actions pour continuer à avancer dans l’histoire. Cependant, vous ne pouvez remonter que le temps passé dans la zone où vous vous trouvez. Dès que vous en sortez, vos choix s’enregistrent et un nouveau laps de temps commence, représenté par un petit tourbillon en haut à gauche de votre écran.
Dès que vous ferez une action décisive, un petit message s’affichera à l’écran et vous aurez le choix de remonter le temps pour changer votre décision, ou non.
« J’aurais peut-être dû intervenir », vous dit Max après une dispute. Vous remontez donc le temps et vous intervenez, sauf que désormais, elle dit « Je n’aurais peut-être pas dû m’en mêler… » C’est bien à vous de savoir ce que vous voulez faire, sans vous laisser influencer par les pensées de Maxine, qu’elle partage continuellement avec vous en voix-off.
A vous d’explorer tous les recoins, de fouiner partout et de discuter avec tout le monde. Chaque objet avec lequel vous pouvez interagir s’entoure d’un trait de crayon qui rappelle votre journal intime.
L’immersion repose sur l’exploration, souvent sans conséquence sur l’avancée de l’histoire. De votre journal intime mis à jour très régulièrement, aux ordinateurs, en passant par votre téléphone, vous pouvez tout lire. Chez votre amie ou dans la chambre de votre rivale, vous pouvez fouiner, regarder leurs photos ou leurs messages, découvrir leurs goûts et leurs secrets. Vous pouvez arroser votre plante, écouter de la musique grâce à votre chaîne Hifi, vous reposer sur votre lit. Vous plongez dans la vie et la tête de Maxine.
Une atmosphère lente, envoûtante :
Les choix esthétiques de Dontnod rendent ce jeu particulier, avec comme principale élément la lumière extrêmement travaillée. L’atmosphère reste chaleureuse et rassurante, ce qui renforce l’impact des visions sombres et cauchemardesques que subit Max, d’une tempête menaçante sur les bords de mer.
Les développeurs avaient pour but premier de toucher les joueurs. S’asseoir au bord d’une fontaine ou sous un arbre, juste pour réfléchir quelques minutes et rester assise tranquillement au son d’une guitare sèche, pouvoir aller dans sa chambre et jouer de la guitare juste pour le plaisir, c’est plutôt rare dans un jeu. Mais c’est en partie grâce à cela que les joueurs ont pu être touchés et s’identifier dans l’histoire. Ça reflète parfaitement le côté tranquille et chaleureux que Dontnod a voulu donner et qui nous rapproche du personnage de Maxine.
En vous promenant dans un jardin, vous entendez une tondeuse démarrer au loin et vous vous attendez à sentir l’odeur de l’herbe fraîchement coupée. La bande sonore très travaillée finit de rendre Life is Strange immersif. Avec des titres de groupes connus comme Mogwai, Angus and Julia Stone ou encore José Gonzalez, la bande originale est signée par Jonathan Morali du groupe Syd Matters qui s’est largement inspiré de musique indie folk pour accompagner et finaliser l’ambiance de Life is Strange.
Le jeu possède également un côté clins d’œil récurrents, puisqu’il contient énormément de références, parfois plus subtiles que d’autres, à des séries de fiction, des musiques ou des films indépendants. Vous pourrez par exemple lire dans le journal de Maxine le nom de série qu’elle a récemment regardé, comme le Doctor Who. C’est parfois toute une conversation sur des films qu’elle peut avoir avec ses amis, comme nous le faisions nous-même à l’école. De façon plus discrète, vous pourrez remarquer les plaques d’immatriculation des voitures dans le parking de l’académie, par exemple « TW-N P-KS » pour Twin Peaks, ou encore « TH-X FL-S » pour The X-files.
Sachez qu’une fois l’épisode terminé, vous pourrez jouer en mode collectionneur, pratique notamment pour avoir les trophées qui reposent sur des photos à prendre en jeu. Ce mode de jeu ne garde pas vos choix d’actions en mémoire, seulement les objets.
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Points Positifs
Doublage très réussi qui reflète bien les ados
L’ambiance particulière du jeu très chaleureuse
Le côté sociale et intime bien travaillé
L’histoire bien écrite et prenante
La bande originale
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Points Négatifs
Demande une sensibilité particulière pour s’immerger complètement
Un gameplay très simple
Peu de réflexion
Pas de VF mais une VOSTFR
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Nous nous retrouverons pour un test final dès que le dernier épisode sera sorti 🙂
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Life is Strange – épisode 1 Chrysalis
Plateforme : PS4, PS3, Xbox One, Xbox 360, PC
Développeur : DONTNOD
Genre : Aventure
Éditeur : SQUARE ENIX
Sortie : 30 janvier 2015
Test réalisé sur PS4 à partir d’une version commerciale.